dimanche 13 mars 2011

Les touches de mon clavier se mettaient à écrire toutes seules. Surtout des chiffres et des consonnes à répétition. Je savais que la personne destinataire de mes mots n'y comprendrait rien. Et je ne voyais pas le moyen de m'en sortir. D'arrêter ce flux incontrôlé de non sens. J'ai finalement réussi à taper "un ange" et je suis arrivée en haut, tout en haut d'une montée abrupte dévoilant une vallée sublime, genre de caprice pictural du XVIII ème. On m'avait répondu. Les vaches paissaient au loin dans une lumière de tableau hollandais.  
Je me suis réveillée seule sous ma couette toile à matelas dans le vieux canapé lit de Zosia. 5h30... Le soleil émerge. Les levées de terre enfouies dans la vapeur de l'aube encadrent la Vistule paisible. Têtes de lit végétales. L'herbe rousse est gelée, à perte de vue, comme une propagande à l'hiver. Qui n'en finit pas. Ce soir on mangera du hareng.
Mon regard se promène dans cette pièce, si familière. Je jouis de chaque détail. Je m'en imprègne. Le rayon de lumière dorée sur ce carreau bleu de Delft. La poussière qui danse au dessus du vieux samovar. Le vase en verre orange, l'autre, indigo, sur l'armoire à vaisselle. L'horloge rococo. Les fauteuils rouges des années 40.
Le moteur du frigo repart comme un tupolev antique et berce mes songes matinaux embrumés.  
Elle est assise à l'à pic de ma tête... Nonchalante et alanguie. Je pense qu'elle sait que je la regarde. Elle n'a pas de collier mais porte une bague à chaque annulaire. 
Il a décidé qu'elle s'appelait Magadalena. Parce que sa jupe à pois bleue lui plaît. Moi je trouve qu'elle a plutôt une tête et un air. Un air surtout.  A s'appeler Irène. A cause de son chemisier ourlé de dentelle fine. Et de sa manière déviée de me jauger. Ses bras caressent les accoudoirs. Elle sourit, énigmatique Joconde de Przegorzaly. Les prénoms et les gens nous viennent pour des raisons étranges. Il vaut mieux renoncer à comprendre et entrer en contemplation.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Ce texte est très beau. Très beau parce qu'énigmatique sans doute.

blablatok a dit…

oh! merci :-)